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    Dame Ethaine

    Aéllys
    Aéllys
    Admin


    Messages : 366
    Date d'inscription : 06/08/2011
    Age : 45
    Localisation : Parmi les forêts éternelles

    Dame Ethaine  Empty Dame Ethaine

    Message par Aéllys Lun 13 Fév 2012 - 0:20

    Avant tout, une petite explication. Ce texte, c'est l'histoire d'un Dk que j'ai créé il y a longtemps sur plusieurs serveurs. Toujours à peu près le même skin, le même nom, à quelques variantes. Et puis, ces temps, j'ai recommencé à jouer (commencé plutôt) celui du serveur Kirin Tor, pour voir comment c'était, là bas. Et je suis allé voir le forum Rp de Kirin Tor. et j'ai pris peur. J'ai vu des gens fermés, coincés sur le Lore et leurs préjugés. "Un Dk, c'est pas fait pour Rp, c'est mauvais, ça n'a rien à faire dans Wow.". Ok. Et? De là découle l'histoire de mon Dk. Quant je lis "Un Dk n'a rien à faire dans le Lore" ça m’inspire. C'est sorti tout seul et j'avais envie de l'exposer, juste comme ça.





    Dame Ethaine  Thyrie15


    Douleur, peur, solitude. Ces mots sont mes compagnons de toujours, intimes et fidèles. Je suis née noble. Voilà ma malédiction. Ma naissance n’était pas voulue : elle était obligée. Je n’étais pas désirée, j’étais planifiée. A mes premières minutes de vie, mon destin était déjà tracé. J’étais fille, femelle, reproductrice. Je serais mariée, contrat conclu pour entretenir une quelconque amitié, un appui, un calcul politique où nul sentiment n’avait sa place. Comme une bête à un marché, les maquignons m’ont soupesé, évalué. La dot fût décidée avant même que je n’ouvre un œil. Mon premier cri était un cri d’esclave.
     

    Je n’appris rien durant mon enfance, rien d’autre que d’être une femme modèle, docile, belle et silencieuse. L’homme est tout et sans lui nous ne vivons pas. Tel était mon mantra, depuis mes premiers pas. Mon mari était bien plus âgé que moi. Un allié de mon père, plus que ça, pire que ça ; un ami de longue date. Nos noces, dès que j’eût atteint l’âge de femme, furent fastueuses et mémorables, rassemblant tout ce que Lune-d’Argent comptait de vieilles lignées et de famille de haute souche. Naïvement, ce jour-là, j’étais réellement heureuse de mon sort.

    Le lendemain, je n’étais déjà plus. Envolée, les illusions. Envolée, l’innocence. J’avais été déflorée par une brute qui levait la main sur moi comme certains contemplent le ciel : à chaque occasion. J’allais vite m’en rendre compte, ma vie s’était transformée en un enfer sans fin. Le rêve de petite fille qu’on m’avait servi sur un plateau se confrontait à la réalité. Et la réalité est laide. Chaque jour qui passait entre les murs de son palais me voyait m'éteindre un peu plus.

     
    Je m’évadais à la première occasion. Une promenade dans les jardins avec une servante qu’il fût facile de renvoyer, une course à travers bois, la peur au ventre, le souffle court, mais l’espoir me portant. Mon père allait comprendre. Il allait me sortir de là. Mon père n’en fît rien. Il me renvoya chez mon mari après m’avoir sermonné ; il était furieux  comme jamais je ne l’avais vu. Mon mari, ce noble homme, me battît comme plâtre et me laissa pour morte sur les dalles de marbre de l’entrée. J’y restais un jour et la tombée de la nuit à pleurer toutes les larmes de mon corps.

    Je recommençais. Une soirée mondaine, amis, alliés, rassemblés au clair de lune. Une porte ouverte, une distraction d’un instant. Ce furent les gardes de la propriété, véritable petite armée privée, qui me trouvèrent dans une grange éloignée. Le garçon de ferme, ange blond innocent, calcula le revenu qu’il pouvait tirer de son information. Il fût richement récompensé, doublement,  puisque j’avais payé son silence. Cette fois-là, je cru mourir pour de bon. Je ne repris conscience que le troisième jour.
     

    J’étais enceinte. Ce fût sans doute ce qui me sauva. Il ne leva plus la main sur moi dès lors que je portais son héritier. J’aurai voulu que ces mois ne se finissent jamais. C’était un garçon.  Au fond de moi-même, j’espérai encore que le fait d’avoir rempli ma mission en lui donnant un fils allait changer son attitude à mon égard. J’étais naïve et folle. Tout recommença. Chaque nuit ou presque, il me violait. Chaque jour, il me frappait. Lentement, mon esprit vint s’emprisonner derrière un voile de résignation. Bientôt, je ne fût plus que sa chose, craintive et obéissante ; je ne cherchais plus à fuir ; je ne cherchais plus à lui plaire. Je n’attendais que la fin de la journée, encore et encore.
     

    Je lui donnais trois fils, à quelques années d’intervalle. Il était très fier de ses héritiers, joyaux parfaits et malléables, son sang et sa lignée. Peu à peu, il me délaissa pour des maîtresses plus consentantes et plus jeunes. J’avais rempli mon office. Je pouvais être remisée. J’aurai dû en être satisfaite, mais c’était bien trop tard. Mon cœur et mon esprit étaient desséchés, je n’étais plus depuis longtemps qu’une fleur fanée qu’on garde par habitude. Seuls mes fils réussissaient à me rendre un pâle sourire, lorsque je pouvais les voir parmi leurs nourrices.

    Le temps est un allié, a dit quelqu’un. Parfois il est aussi un tortionnaire. Les enfants sont devenus des hommes, les hommes des copies de leur père. Ils me respectaient, mais ne m’aimaient pas. J’étais leur génitrice, ils me devaient la vie, mais je n’avais été qu’un fantôme dans leur enfance. Ils secondaient leur père et partageaient avec lui sa perversion et sa cruauté. Les chiens ne font pas des chats, disait un autre. Ses fils n’étaient pas les miens. Aucun espoir, aucun rayon de soleil, ne pouvait plus égayer ma morne vie. Les années passèrent.


    La fin de notre monde arriva en une nuit. Ils déferlèrent sur notre cité telle une horde déchaînée vêtue de noir, des ombres sanguinaires qui ne laissaient derrière eux que ruines et désolations. Ils vinrent souiller notre matrice, notre source de vie, le Puit du Soleil, et dévastèrent tout ce qu'ils purent  à des kilomètres à la ronde. L'armée d'Arthas était en marche et notre race en fût changée à jamais. Moi aussi.


    Le matin se levait quant ils furent en vue du palais de notre famille. Une troupe d'une vingtaine de cavaliers et de goules, qui faisaient fuir la fine brume du matin en approchant au petit galop de leur monture. Je les ai vu de la fenêtre de ma chambre. J'ai couru dans les couloirs, passé la porte, couru à leur devant. L'espoir, enfin. Je ralenti pour faire les derniers pas d'un air digne et fier, marchant face à celui qui devait les mener. C’était un humain. D'un signe de sa main, tous stoppèrent devant moi. Je n'avais pas juste peur. J'étais terrorisée.

    Je ne portais qu'une ample chemise de nuit d'un blanc immaculée, pieds nus, cheveux défaits. D'un noir de jais, ils me tombaient dans le creux des reins, faisant ressortir la pâleur de ma peau. Je ne me cachais nullement. J'attendais là, sur le chemin, 10 mètres à peine me séparaient d'eux. L'homme mît pied à terre. Il vint vers moi, me prît le menton dans sa main ganté et me leva la tête. Il étais grand. Je cherchais son regard. « Tu n'a pas peur ? » Sa voix caverneuse m'emplissait d'horreur. Je dût me concentrer. « Nulle peur ne peux plus m'atteindre. Je suis venu vous demander ma délivrance. » Je tremblais de froid et de crainte mêlée. Enfin, j'allais être libérée de ma vie. « Et de quoi devrions nous te libérer ? » Son ton était égal quoiqu'il dise, d'une platitude exagérant encore l'impression de froideur qu'il donnait. Mes jambes faiblirent. « De mon époux, de mes fils, de ma famille... » Je crânais devant lui, comme on me l'avait si bien appris toutes ces années. Ne pas montrer ses faiblesses. Rester digne de son rang. J'étais l'image vivante de la dignité. Son rire emplît l’atmosphère, bas, rauque, lourd de menace. Je sursautait. Rien n'était naturel là dedans. « Tu veux échapper à ta prison dorée et tu veux que je mette fin à ta vie. » Tandis que je restais immobile, fixant son regard à travers son casque, il me lâcha et se redressa. A nouveau son rire. J'allais souvent l'entendre et j'appris très vite qu'il n'avais rien de joyeux pour ceux qui l'entendaient. Un long silence s'ensuit, tandis que les rayons matinaux de l'astre béni venaient chasser la brume et couvrir la scène d'un halo de lumière.


    « Je vais exaucer ton souhait, noble dame. Mais pas comme tu le pense. Tu va te venger et dès que ce sera fait, tu chevauchera à mes côtés. Tu deviendra mon épée et tu aimera ça. Mais ce ne sera pas si simple... Je ne vais pas te laisser oublier. Tu gardera ta conscience et tes sentiments tout le long de ta nouvelle vie mais tu ne pourra plus en profiter. Ce sera mon cadeau pour ta liberté. » Je ne compris rien à ses paroles, mais je distinguais nettement l'ironie qui les emplissaient. Il leva la main vers moi et me prit à la gorge. Il serra. Je me laissais faire jusqu'à ce qu'un voile noir survint devant mon regard. Je tombais dans l'inconscience.

    J'ignore encore aujourd'hui ce qui s'est passé par la suite. Jamais je ne l'ai vu faire ça. Je sait seulement que je me réveillais. Je me sentais bizarre. Je me sentais autre. Je me sentais emplie d'une puissance et d'une assurance qui n'étaient pas les miens. Il étais là, me tendant une main pour me relever. Je l'acceptais. Je vis ma main et ma peau avait foncé. Je ne fût même pas surprise. Je n'avais mal nul part. J'avais l'impression d'être inondée de force brute, qui débordait, irradiait, repoussait mes faiblesses au plus loin de mon âme. Je le regardais. Il avais ôté son casque. Il n'étais ni beau ni laid. Je ne voyais que ses yeux d'un bleu irisé et son sourire satisfait. Il lança un ordre et on lui tendît une arme. Il me la tendît à son tour. C'était une épée mi-longue, son acier bleuté luisait au soleil du matin, tout le long du tranchant s'élançaient des runes complexes et entrelacées. Je la prît en main. Aussitôt, elle sembla s'éveiller et s'habilla d'une douce aura bleue et verte, se mêlant en un vif turquoise. « Retourne chez toi. Fais ce que tu a à faire. Rejoint moi une fois que tu auras terminé. » Il ne me laissa pas le temps de réagir, de lui demander pourquoi, où. Il tourna les talons, remonta sur son palefroi qui renâcla sous la contrainte de son cavalier et fît faire demi tour à toute sa troupe. Ils prirent le galop et s'éloignèrent. J'étais seule sur le chemin. A quelques distances, attaché à un buisson, un palefroi maudit attendait patiemment, immobile telle une statue. Lentement, je me tournais vers ma maison. Lentement, j'y retournais.


    En arrivant vers le palais, je vît l'effervescence à l'intérieur. Les gardes et les domestiques courraient partout, se réunissant, se préparant, criant et se hélant. Les battants de la porte s'ouvrirent en grand sous ma poussée. Le corps du premier garde tomba à mes pieds et sa tête roula sous une table. Jamais je n'avais tué quelque chose et je découvrais que c'était jouissif. Et facile. Le second tomba à genou dans un râle, se tenant la gorge à deux mains, tentant de stopper l'épanchement de sang qui emmenait sa vie. La suite se déroula comme dans un rêve cotonneux. J’avançai et mes gestes étaient instinctifs, je ne réfléchissais pas, je me mouvais naturellement, comme si l'épée m'entraînais dans une danse, sa danse sanglante et meurtrière. Je ne m'arrêtai que quant je ne vît plus personne à ma portée. Je savais exactement où aller. Je traversai la maison et arrivai à la salle d'arme, tout au sud, à l’extrémité qui donnait sur la grande terrasse. Ils étaient là. Mon époux et mes fils. Les gardes de la porte s'écroulèrent au sol et j'entrais.

    Leurs regards à tous les quatre se posèrent sur moi. Ils n'étaient pas certains de ce que leur dévoilait leur vision. « Ethaine.. ?! » La voix incrédule de mon époux rompît le silence. Mes fils s'avancèrent prudemment, la main à la garde de leurs armes, tout aussi perplexe que leur père. « Mère, que vous arrive-t-il ? » Il pensait que j'avais été attaquée, blessée peut être. Je le lût dans son regard avant de frapper. La lame s’enfonça dans son torse et vînt transpercer le coeur à travers les côtes comme si elle s’enfonçait dans du sable mou. Mon cadet s'écroula à genou sans un mot, un filet de sang lui coula de la bouche. Il ne comprît pas tandis qu'il mourrait à mes pieds. J'entendis un juron fuser et un ordre bref. Mes deux autres fils s'élançaient de concert pour me prendre en tenaille. Ils ne voulaient pas me tuer, c'était visible. Leur manière de tenir leur arme, leurs gestes hésitants. Je bloquais une première attaque du revers de ma lame, tournait et repoussait le second d'un coup de coude en pleine figure. Le temps qu'ils se reprennent, mon époux avait empoigné une hache et traversait la salle. Je levais le bras vers lui et refermait la main. Il fût stoppé net dans son élan, lâcha son arme tandis qu'il portait les mains à sa gorge, cherchant un filet de souffle, tentant de faire se relâcher une étreinte invisible. Je m'en désintéressais aussitôt. Mon ainé se ruait vers moi, le visage haineux. Je pivotai sur moi même, pointant l'épée vers ma gauche. Il arrivait trop vite, pensant me surprendre, il ne s'attendait en rien à ce que je puisse réagir à une telle vitesse. J'étais sa mère, je n'étais pas sensé me battre, après tout. Il ne pût l'éviter. La pointe de mon épée vint percer sa gorge et ressortit dans sa nuque. Il tendit une main tremblante vers moi, cracha, toussa, et s'effondra à terre comme je retirais la lame. Il en restait un. Je me baissai d'instinct et le tranchant de son épée frôla mon épaule. Je fît un bond de côté et son épée frappa le sol où je me trouvai l'instant d'avant. Il avait toujours été le plus doué aux arts de la guerre. Le préféré de son père. Je bloquai son épée avec la mienne et tandis qu'il se dégageait d'un geste brusque, je me relevai. Je lui sourit. Il avait peur. « Pourquoi.. !?? Mère !! Pourquoi... » Ce furent ses derniers mots. Il tenta quelques passes d'armes, mais un estoc à l'aine le surpris puis je vis son regard pâlir tandis qu'il suivait mon geste et que mon épée venait fracasser sa nuque de plein fouet. Il tomba aux côté de ses frères. Sa chute fit un bruit sourd. Je marchais dans une mare de sang.


    J'avançai vers le centre de la pièce. La pointe de mon épée traînait au sol à mes côté, faisant gicler des étincelles orange en rayant le sol de marbre. Mon mari étais toujours là, à terre, asphyxié par quelque chose qu'il ne voyait pas. Je fis un geste du revers de la main et le sort se dissipa. Sa respiration sifflait. Son regard brûlait de haine et de colère. Il voulait clairement me tuer. Puis il s'évanouit. Je le traînai vers un des murs, celui qui possédait des attaches, et l'y enchaînait. Il ne tarda pas à reprendre conscience. J'attendis qu'il fût pleinement revenu à lui puis je m'expliquai, face à face. Toute une vie de rancœur, de douleur et de frustration à lui dire.  

    Lorsque je sorti de la maison, le soir était venu. Le paysage était tout entier baigné d'une lueur  fantomatique, bleutée, la pleine lune me saluait de toute sa splendeur. Il n'y avait pas un bruit.  La nuit était douce et chaude, mais je n'y prêtait garde. Ma robe était écarlate, j'avais le visage et les cheveux couverts de sang. Je tenais l'épée à la main. Je ne m'arrêtai pas sur le seuil, allant droit vers la monture qui m'attendait toujours. Derrière moi, je laissais mon passé et une maison silencieuse. Une montagne de cadavre la peuplait. Dans la salle du fond, il y avait mes trois fils à qui j'avais eu la bonté d'offrir une mort rapide et une masse informe, sanguinolente, qui avait été mon époux. Je ne savais pas avant ce jour qu'on pouvait amener la torture à ce point de raffinement. Ses hurlements avaient sonnés chacun comme un appel à la délivrance de mon âme. Chacun de ses cris payait ma propre souffrance. Et je les avaient tous appréciés à leur juste valeur.


    Je m'élançait à travers la nuit sur des chemins inconnus. Je n'étais plus sortie seule depuis mon mariage mais il me semblait que je savais où je devais me rendre. Chaque pas m'était familier. Le vent giflait ma figure, mais c'était un vent de liberté. J'arrivais aux ruines de ce qui étais le matin même une cité resplendissante et passais à côtés de monstruosités dont je n'avais jamais jusque là imaginé l’existence. Aucun de ces monstres, aucune des patrouilles, ne firent attention à moi. Au détour d'une rue envahie de cadavres carbonisés, je débouchai sur la place où était le camp. Il était là. Mon nouveau maître. Le chevalier humain. Il m'attendait.


    Je n'ai eu aucun remord. Je ne ressentais qu'une grande paix intérieure. Je la ressens encore en ce jour. Mais je n'ai pas non plus oublié. Hantée par les cadavres que j'ai laissés. Et incapable de les pleurer, néanmoins. Incapable de me réjouir, de ressentir de la peur, de la joie, de la douleur. Ni morte, car jamais je ne l'ai été, ni tout à fait vivante, car il m'a offert le don, la puissance de son maître, le Roi Liche. Depuis ce soir là, jamais plus je n'ai ressenti quoique soit intensément. C'était là le prix de ma liberté, comme il me l'avais dit.

    Vivre, sans pouvoir l'apprécier.

      La date/heure actuelle est Dim 28 Avr 2024 - 16:18